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Dossier: le financement des films québécois

Photo du rédacteur: Jean St-AmantJean St-Amant

Rares sont les films québécois qui ont fait des profits au cours des 25 dernières années. On peut les compter sur les doigts de nos mains. Les plus rentables sont :


  • Séraphin (2002), budget 6,1 millions $, recettes 10,5 millions $.

  • La Grande séduction (2003), budget 5.7 millions, recettes 9,7 millions $

  • Bon Cop Bad Cop (2006), budget 8 millions $, recettes 9 millions $.

  • De père en flic (2009), budget 6 millions $, recettes 8,8 millions $



L'attraction des gens vers le cinéma n'étant plus ce qu'elle était, particulièrement avec la venue des plates-formes de « streaming », la rentabilité des films québécois est de plus en plus problématique. Pourtant, en 2023, on annonçait en grande pompe dans les journaux qu’à la suite de la pandémie 6 films québécois avaient amassé des recettes de plus de 1 million $, dont Le temps d'un été avec 2,2 millions. Il faut toutefois savoir que la majorité de ces films ont coûté plus de 6 millions $ à produire et restent donc largement déficitaires.


À la différence du cinéma américain qui repose presque entièrement sur l'entreprise privée, le cinéma québécois doit absolument être subventionné par l'État, car le marché est insuffisant pour faire vivre l'industrie du film au Québec. En fait, selon certaines statistiques, la production cinématographique de longs-métrages au Québec est subventionnée à plus de 80% avec des fonds publics, ce qui en fait l'une des cinématographies nationales les plus subventionnées au monde. À cette fin, deux organismes gouvernementaux subventionnent spécifiquement le cinéma : la SODEC (Société de développement des entreprises culturelles) au Québec et Téléfilm Canada au fédéral. En 2022, ces 2 organismes ont octroyé des subventions de plus de 50 millions $ pour la production de longs-métrages de fiction de langue française. La SODEC et Téléfilm Canada ont bien souvent le droit de vie ou de mort sur les projets cinématographiques.


Des crédits d'impôt sont aussi offerts par les 2 paliers de gouvernement. Ces incitatifs fiscaux représentent une forme de financement indirecte. Le Fonds du Conseil des Arts du Québec et le Fonds du Conseil des Arts du Canada octroient également des subventions sous différentes formes aux artistes.


Le reste du financement provient de fonds privés tel le Fonds Québecor. Le Fonds Harold Greenberg (administré par Bell Média) avait soutenu la production de films anglophones et francophones au Canada depuis 2006, mais est malheureusement disparu en 2021 à la grande déception des cinéastes québécois.


Certaines coproductions peuvent aussi amener un financement non négligeable en provenance de producteurs étrangers. La prévente d'un film, qui consiste à négocier avec des distributeurs ou des chaînes de télévision avant le début du tournage, peut également être une source de financement viable. Enfin, certains réalisateurs et réalisatrices en désespoir de cause, lancent des campagnes de sociofinancement pour réussir à réaliser ou même pour terminer leurs films faute de moyens.



La SODEC

La Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) est une société d'État québécoise créée en 1995 qui relève du ministère de la Culture et des Communications. Elle gère plusieurs programmes d’aide financière dans le domaine de l’audiovisuel, dont, dans le cas qui nous intéresse, l'Aide à la production de longs-métrages de fiction. Depuis plusieurs années, la SODEC a subventionné annuellement une douzaine de longs-métrages québécois, dont une dizaine en langue française. Le processus de demande d'aide est fastidieux et le programme est très contingenté.


« Les projets sont évalués selon plusieurs facteurs, dont l'expérience des participants, notamment du réalisateur, du producteur et du distributeur; les antécédents de l'entreprise; le devis et le mode de financement du projet; le plan de promotion et de mise en marché. Les critères: le caractère inédit du thème, son originalité, la crédibilité de l'histoire et des personnages, la structure dramatique, le rythme du scénario, l'intérêt du public, les dialogues. Les critères sont différents de ceux de Téléfilm Canada ».  (Source: La Presse, Financement de films : comment ça fonctionne?, 23 mars 2010)


Lorsqu'un projet est refusé, il y a la possibilité de le soumettre de nouveau avec de nouveaux éléments créatifs cohérents, mais après trois refus, le projet n'est plus admissible.


On note que dans son rapport annuel 2022-2023, la SODEC a octroyé 47 aides sélectives à la production de longs-métrages de fiction pour un total de 38,8 millions $. Cinq films sur un total de 19 longs-métrages subventionnés ont reçu plus de 2 millions$.


Téléfilm Canada

Téléfilm Canada (TC) est une société d'État créée en 1967. Elle relève du ministère du Patrimoine canadien. TC offre un soutien financier et stratégique aux industries canadiennes du cinéma, de la télévision et des nouveaux médias. Elle se compose de 3 fonds principaux, dont le Fonds du long métrage du Canada.


« L'argent est distribué à la suite d'un processus d'évaluation par un jury, qui se base sur des critères précis. L'équipe rencontre le scénariste, le réalisateur, le producteur et le distributeur. Chaque juré remplit sa partie du rapport de recommandation (grille d'évaluation). Il y a ensuite discussion sur chacun des éléments et les jurés passent au vote, ce qui amène un classement de projets. Avec l'aide des analystes financiers, la directrice évalue ensuite, compte tenu du budget de chaque film et de l'enveloppe de Téléfilm, combien de projets peuvent être financés. Elle s'assure d'avoir un portefeuille suffisamment équilibré. » (Source: La Presse, Financement de films : comment ça fonctionne?, 23 mars 2010)


Il n'y a aucune limite de fois que le projet peut être présenté.


Téléfilm Canada a annoncé en août 2023 qu'en vertu du programme de production, seulement 8 longs-métrages de fiction de langue française allaient se partager 14 millions $ en subvention. Toutefois, chaudement décriée par l'industrie cinématographique québécoise, la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a annoncé en janvier 2024 un soutien supplémentaire de 100 millions $ sur deux ans pour l'ensemble des programmes de Téléfilm Canada.



Fonds Québécor


Le Fonds Québecor a octroyé depuis 2010 plus de 16 millions $ à la réalisation de longs-métrages québécois par le biais de son Programme d’aide à la production cinématographique. Leur plus récent rapport annuel 2021-2022 indique que le Fonds a alloué 1,2 million $ CA à 5 longs-métrages. Les films choisis ont été bien ciblés puisqu’ils ont connu de relatifs succès au box-office (Le temps d’un été, 23 décembre, Cœur de Slush, Simple comme Sylvain et Coco Ferme).



Films grand public ou films de répertoire


Selon le propriétaire de salles de cinéma Vincent Guzzo, le manque d'intérêt du public au cinéma québécois (d'où sa rentabilité), provient du fait que les réalisateurs ne tournent pas le genre de films que les Québécois veulent voir. Selon lui, le cinéma québécois est de plus en plus subventionné et rapporte de moins en moins. Il est vrai que certains films populaires ou « grand public » ont réussi à faire leurs frais et même certains profits, mais faut-il absolument se conformer aux critères hollywoodiens et perdre son identité et son originalité pour rendre cette industrie rentable? Nous formons une société distincte et l'industrie cinématographique québécoise et son cinéma d'auteur se doivent de le refléter au même titre que les autres milieux artistiques.


Des solutions au financement ?


Le rapport du Groupe de travail sur les enjeux du cinéma (GTEC) publié en novembre 2023 apporte des recommandations intéressantes pour promouvoir le cinéma québécois et trouver de nouveaux moyens pour le financer. Par exemple, afin de stimuler les investissements privés par la fiscalité, il recommande l'instauration d’un organisme gouvernemental comme la SOFICA (Société de financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle) en France. Il recommande aussi que le succès des films d’ici et leur rentabilité soient mesurés non seulement par les revenus générés dans les salles locales de cinéma ; la mesure devrait tenir compte du nombre de spectateurs rejoints sur l’ensemble des fenêtres de diffusion. Il est estimé qu’on regarde 18 fois plus de films au petit écran qu'au grand écran. Il faudrait également prendre en compte les sélections de films dans les festivals, les prix remportés, et leur rayonnement international.


Bon cinéma !


Un gros merci à ma conjointe Barbara pour son travail de révision et de correction.







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