Si vous êtes allés au cinéma dernièrement, vous avez sans doute remarqué une baisse considérable dans la fréquentation des salles. Il n'est pas rare que la projection se fasse devant une salle presque vide, même en soirée. On se demande alors comment les propriétaires de salles font pour s'en sortir. La pandémie a été très dure pour l'industrie du cinéma et les propriétaires espéraient un retour massif de la clientèle, ce qui ne s'est pas produit. Les derniers chiffres montrent une chute de près de 30 % de la fréquentation des salles par rapport à la situation qui prévalait avant la pandémie.
Sûrement certaines personnes sont encore craintives de retourner au cinéma à cause des risques toujours présents d'attraper les virus, mais la cause la plus probable est que les gens ont développé de nouvelles habitudes avec la pandémie. Il y a de plus en plus de bons films diffusés sur les plateformes telles Netflix, Amazon et Disney et de plus en plus de personnes s'y abonnent. Aussi les gens se sont munis d'écrans de plus en plus grands ; on peut maintenant magasiner une télé de 85 pouces à moins de 2000 $. Ils ressentent alors beaucoup moins le besoin de se rendre dans une salle de cinéma pour obtenir l'effet de voir un film sur grand-écran. Enfin, avec l'inflation une sortie au cinéma en famille est devenue presque un luxe, surtout si l’on passe par le comptoir à bonbons.
Comment les cinémas s'en sortent-ils? Heureusement pour les propriétaires de salles, pour plusieurs personnes encore, un film en salle au cinéma rime avec popcorn. La vente de ces délicieux grains fraîchement éclatés permet encore aux salles de subsister. Mais pour encore combien de temps?
Il y a quelques années, le magazine Time rapportait que les cinémas réalisaient environ 85% de profits sur les ventes au stand à friandises, dont la majorité était attribuable au popcorn. La marge de profit sur ces produits peu chers est alors énorme. On parle de 800 % sur le popcorn et de 500 % sur les boissons gazeuses. Quand on sait que le petit popcorn coûte en 2022 aux alentours de 7,50 $, on peut facilement voir l’importance de sa consommation dans l’équation. La plupart des personnes dépensent plus pour les friandises que pour le prix du billet de cinéma.
Le modèle d'affaires des cinémas est à peu près universel. Pour une entrée de 13,50 $, 2,00 $ sont réservés aux taxes. Sur les 11,50 $ qui restent, de 50 à 70 % du montant est versé aux producteurs et aux distributeurs du film. Entre 3,00 $ et 4,00 $ restent au propriétaire pour faire fonctionner son cinéma (loyer, électricité, salaires, impôts, etc.). Il faut donc absolument trouver d'autres revenus pour équilibrer le budget et c'est là que le popcorn entre en scène.
On se souviendra que pendant la pandémie, Vincenzo Guzzo, propriétaire de la chaîne de cinémas Guzzo, avait refusé de rouvrir ses cinémas parce que le gouvernement québécois interdisait la vente de popcorn, le condamnant, semble-t-il, à rouler à perte. Cela a mené au « Popcorngate », où le gouvernement a dû offrir aux propriétaires de salles de cinéma une compensation monétaire pour la perte des revenus générés par le popcorn.
Pour gonfler encore plus les profits, Guzzo a récemment remplacé toutes les friandises vendues dans ses cinémas par sa marque maison, Mr. Sunshine (le sobriquet donné à l'homme d'affaires). Il est vraiment étonnant de voir le « candy bar » des cinémas Guzzo rempli uniquement de produits maison. Oubliez les Smarties et la réglisse rouge Twizzlers.
On remarque également depuis quelques années que l'offre alimentaire a augmenté grandement dans les cinémas, particulièrement chez Odéon. Nachos, hotdogs, hamburgers, pizzas, wraps, poutines, bretzels et churros peuvent maintenant être consommés à l’intérieur des salles de cinéma. Il n'y a plus seulement les sons des aliments croqués (popcorn, chips) qui nous importunent, mais aussi les odeurs qu'ils dégagent !
Bref, les propriétaires de salles de cinéma ont beau tiré profit « au maximum » de la faim des spectateurs qui restent encore fidèles aux salles de cinéma, malheureusement ils ne pourront probablement pas résister dans un avenir prochain à la baisse presque inévitable de la fréquence du public en salle.
Bon cinéma (quand même) !
Un gros merci à Barbara pour son travail de révision et de correction.
Comentarios